La
"philosophie" du projet de bouclier
antimissiles américain
par
Pierre PASCALLONOn ne cesse ces dernières
semaines, ces derniers jours au sommet du G
8 à HEILIGENDAMM- de parler du déploiement du
"segment" européen du bouclier
antimissiles américain impliquant la Tchéquie
et la Pologne.
En effet WASHINGTON a
officiellement demandé le 20 janvier 2007 à la
République Tchèque et à la Pologne d'accueillir
respectivement une station radar et des
intercepteurs de missiles pour parer à d'éventuelles
attaques en provenance de l'IRAN.
On peut dire que, pour les
Etats-Unis, il s'agit avec la poursuite du
déploiement de leur bouclier antimissile- de
conforter le "cur" militaire de
leur hyperpuissance.
? Les Etats-Unis cherchent
de toujours à se doter d'une "défense sans
impasse" assurant au mieux l'invulnérabilité
de leur territoire continental. Le rêve des
américains est bien dans cette perspective de
conserver leur "épée" le "nucléaire"-
tout en se dotant d'un "bouclier", d'une
"carapace" c'est le système
antimissiles qui doit garantir encore davantage
le sol de l'oncle SAM-, afin que leur territoire
soit et reste complètement inviolable. En d'autres
termes, il ne s'agit donc pas avec le
bouclier antimissile- de remplacer la dissuasion
vue comme "sanctuarisation", mais de la
compléter si possible pour parvenir grâce
au projet d'une défense antimissiles vue comme
de la "super-sanctuarisation"- à une
défense globale et complète, réduisant à
terme la vulnérabilité du territoire américain
à toute agression balistique externe, hier celle
des fusées de l'Union soviétique ; demain ou
après-demain, il pourrait s'agir des fusées
balistiques intercontinentales des "pays
voyous" de "l'axe du Mal" (IRAN,
Corée du Nord,
) et dans quelques années,
plus sûrement, de la Chine, la future super-puissance,
au centre des préoccupations stratégiques
américaines et sans doute la vraie cible cachée
du projet de bouclier antimissiles américains.
Il convient donc au
nom d'une version stratégique du principe de
précaution- de continuer à développer, parmi
les toutes premières priorités, "la
Missile Défense" afin de rendre les Etats-Unis
invulnérables de façon asymptotique, à la
menace politique et stratégique des armes de
destruction massive. A dire le vrai, le boucler
antimissile américain, qui continue à se mettre
en place afin d'assurer le renforcement de la
protection de leur territoire national, est
conçu dans une perspective de plus en plus
"offensive" : les Etats-Unis entendent
passer en effet de la "dissuasion"
("deterrence") à l'action "préventive"
("préemption") : c'est la doctrine des
"frappes préventives", de la guerre
"pré-emptive" ou "préventive"
de l'Administration BUSH.
Dans ce cadre, la défense
antimissiles est perçue le concept de
"sanctuarisation agressive" est
utilisé par certains en ce sens- comme l'outil
qui doit permettre aux Etats-Unis de frapper
comme ils l'entendent à travers le monde : l'IRAK,
la CHINE,
?... sans craindre en retour de
représailles graves. Bref, le bouclier
antimissiles permet de substituer au concept et
au scénario de la "destruction mutuelle
assurée" (MAD) où l'équilibre des
forces en présence interdit aux adversaires la
possibilité d'une attaque préventive suivie d'une
riposte de même grandeur ou supérieure- le
concept de "destruction unilatérale
assurée" (DUA) ; en un mot, il devient le
complément nécessaire à la "prospection
de forces militaires", autrement dit de la
capacité des ETATS-UNIS de porter tout de suite
la bataille sur le sol ennemi sans exposer son
propre territoire à un nouveau chantage.
? On perçoit mieux ainsi
le rôle clef que joue et doit jouer demain le
bouclier antimissiles pour les Etats-Unis, qui
avec cet outil d'une supériorité absolue et
définitive, visent désormais la suprématie
dans la défense plutôt que l'égalité dans la
dissuasion. L'oncle SAM est devenu suite
aux changements géo-stratégiques de 1989-1991 :
effondrement et dislocation de l'URSS,
,
"l'hyperpuissance", dans une situation
de domination et de suprématie sans partage.
Depuis, cette hyperpuissance américaine cherche
à confirmer voire à amplifier cette hégémonie
et cette supériorité en toute hypothèse, dans
toutes les situations, pour toutes les formes de
menaces et de conflits, en s'érigeant le droit
dans le cadre d'une stratégie offensive d'action
préventive- de ne tolérer aucun rival ("no
peer competition"). On comprend mieux dans
cette perspective la place centrale -c'est bien
le "cur du cur"- de la défense
antimissile de territoire puisque tout en
continuant à perfectionner leur "épée"
-conventionnelle, mais aussi nucléaire-, les
Etats-Unis, se donnent en construisant et
en déployant leur bouclier- une asymétrie, une
supériorité absolue.
On sort bien de la
dissuasion mutuelle habituelle et de la parité
nucléaire- ; les américains se donnent avec
le bouclier- les moyens d'approfondir leur
leadership et leur unilatéralisme.
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